Certains médias commencent à s’alarmer sur le fait qu’un El Nino historique pourrait survenir plus tard cette année. Le dernier évènement El Nino d’une telle ampleur prévue, date de 1997-1998. Qu’en est-il en réalité et qu’elle serait les conséquences au Québec ?
El Nino est un changement de la température à la surface de l’eau près de l’équateur dans l’océan Pacifique. Son phénomène contraire est appelé La Nina. Les courants marins et atmosphérique sont interconnectés, donc quand l’eau change de température, cela a tendance à affecter le mouvement de l’atmosphère.
Les modèles à très long terme montrent que c’est une possibilité car les eaux sont anormalement chaudes dans la zone où le phénomène se développe. Une autre indication qui amène à penser qu’un El Nino serait fort cette année est l’indice PDO (Pacific Decadal Oscillation). Il s’agit d’une variation de la température à la surface de l’océan Pacifique et qui déplacent la trajectoire des systèmes météorologiques de manière cyclique sur une période de plusieurs années, voire même parfois décennie. Le PDO arrive en deux phases, la phase chaude (ou positive) ou la température de l’eau est plus chaude sur la côte-ouest de l’Amérique du nord et plus froide dans le centre du Pacifique. La phase froide (ou négative) est le contraire, l’eau est plus froide que la normale près de la côte-ouest de l’Amérique du nord alors qu’elle est plus chaude au centre du Pacifique.
Carte des anomalies de température à la surface de l’océan pour la semaine du 1er juillet 2015. El Nino et le PDO + sont bien visibles.
Le PDO est donc présentement dans sa phase chaude. Plusieurs études tendent à démontrer que lorsqu’un El Nino se forme dans un moment ou le PDO+ est présent, les deux phénomènes interagissent et s’accentuent. La même chose est aussi vraie lors de La Nina (contraire de El Nino) et la phase PDO-.
Maintenant, la météo reste la météo, les modèles ne sont pas parfaits et cela peut changer rapidement. Pour parler d’un évènement El Nino majeur, cela doit se dérouler sur plusieurs mois. Il existe des exemples ou la température de l’océan s’est beaucoup réchauffer rapidement à l’équateur, ce qui a mener les experts à penser qu’un fort El Nino se développait, alors qu’il en était rien car l’atmosphère n’a pas répondu à ce réchauffement qui a duré environ 1 mois seulement avant de décliner. C’est arrivé en outre en Novembre 2014.
El Nino est un phénomène beaucoup plus visible l’hiver aussi. Il est beaucoup plus difficile de voir ses répercussions en été dans l’hémisphère nord. C’est une autre raison pourquoi il ne faut pas s’emballer trop vite.
Les conséquences d’un El Nino majeur au Québec.
Est-ce qu’un fort El Nino apporte un climat différent sur le Québec ? Il est en fait difficile de le prouver. Voici à quoi ressemble un pattern typique El Nino en hiver pour l’Amérique du nord.
Le courant-jet polaire a tendance à plonger sur nos régions. Généralement cela indique du temps perturbé, surtout pour le sud de la province alors que le nord aurait du temps plus froid. Cependant vu que le courant-jet polaire reste près et que le courant-jet Pacifique est plus fort, celui-ci va peut-être plus bloquer les très grandes descentes d’air froid sur nos régions. Il en résulterait d’un hiver un peu plus doux que la normale. Concernant les tempêtes de neige, avec un courant-jet Pacifique plus fort, le nombre de perturbation au sud des USA risque d’être plus grand. Si la configuration atmosphérique s’y prête bien et que le courant-jet polaire réussit à descendre vers le sud et remonter plus sur nos régions (flux méridionale) le potentiel de bonnes tempêtes de neige de type Nor’easter est présent. CLIQUEZ ICI POUR LIRE SUR LA FORMATION D’UN NOR’EASTER
Est-ce qu’il y aurait plus de précipitations et en outre du verglas ? On entend souvent parler que la fameuse tempête de verglas de 1998 était dû en partie à cause d’El Nino. Encore une fois, difficile à confirmer. Le verglas de 1998 a été causé par une multitude de facteurs, en outre un fort anticyclone et la direction des vents à prédominance nord-est à l’approche des systèmes, ce qui a servi de réservoir d’air froid au sol dans la vallée du St-Laurent. Par contre, El Nino a surement joué un rôle avec la configuration atmosphérique qui était présente.
Voici un schéma qui montre les anomalies de précipitations aux USA pendant des années El Nino majeur, moyen et faible. Les phénomènes majeurs sont les images en haut à partir de la gauche. Le vert pâle et foncé montre des anomalies positives de précipitations alors que le brun et le beige montre des anomalies négatives.
Encerclé en rouge, il s’agit du nord-est américain, donc nos états voisins. On peut voir que pour les 7 évènements majeurs survenus depuis 1950, il y en a eu vraiment 3 ou on peut dire que les précipitations ont été au-dessus de la normale. Pour les 4 autres, c’était pas mal dans la normale ou en dessous. On ne peut donc affirmer qu »un El Nino majeur, sans autre interaction atmosphérique, apporte plus ou moins de précipitations dans le sud du Québec.
Donc pour résumé, dans le moment il est impossible d’affirmer avec certitude si El Nino serait majeur cette année. Il faudra attendre encore plusieurs semaines, voire mois avant de réellement pouvoir mesurer l’impact. Nous sommes tout de même déjà en pattern El Nino avec un PDO+, ce qui augmente un peu le risque. Reste à voir s’il se matérialisera.
Si c’est le cas, le sud du Québec pourrait connaitre un hiver un peu plus doux que la normale et connaitre des bonnes tempêtes de neige avec une configuration atmosphérique particulière.
CET ARTICLE EST SEULEMENT UNE DISCUSSION ET UNE HYPOTHÈSE CONCERNANT LE GENRE D’HIVER QUE NOUS POUVONS AVOIR. EN AUCUN CAS IL NE FAUT LE PRENDRE POUR ACQUIS OU COMME UNE PRÉVISION.
Pierre-Marc Doucet.