Une nouvelle dépression est en route vers le Québec pour la journée de mardi et mercredi. Elle apportera des conditions de tempête hivernale sur plusieurs secteurs et de la pluie pour les régions au sud du Québec.
La zone jaune : Les secteurs dans le carrée jaune auront droit a des précipitations surtout de neige avec des accumulations entre 15 et 25 cm et des vents du Nord Est; donc les secteurs entre Gatineau et Charlevoix.
La zone rouge : Les précipitations seront en pluie avec faible risque de neige. Donc, tous les secteurs de la rive-sud du fleuve entre Montréal, l’Estrie et la Beauce.
La zone grise : Les secteurs le long du fleuve entre Québec et Montréal sur la rive nord du fleuve auront de la neige. Sauf en fin de nuit ou la pluie devrait arriver avec des quantités pour le moins nulles avant un retour en neige dans la journée de mercredi.
Donc il faut se dire que le tout se joue sur quelques kilomètres, il n’est pas impossible que la pluie sois plus présente que prévue par les modèles.
Environnement Canada a émis des avertissements de tempête hivernale et plusieurs bulletins météo.
Membres présents: Pierre-Marc Doucet, Jolyane Limoges, Mathieu Bordage, Marie-Maude Leduc
Avec nous aussi: Mike Smith, Joe Wallace (Team BCX)
Après notre incroyable journée du 7 mai , nous avons commencé à redescendre vers le sud puisque les prochains « setup » seraient plus vers le Kansas et l’Oklahoma. Lors de la journée du 8 mai, nous étions presque certains de pouvoir voir d’autres tornades puisque les ingrédients semblaient réunis dans le nord de l’Oklahoma.
Malheureusement, cela ne s’est jamais concrétisé. Nous avons eu droit à une belle supercellule mais les seules tornades ont eu lieu dans le sud de l’Oklahoma et près de Hays au Kansas, où nous avions dormi la nuit précédente… Ouch.
On avait une chance de rédemption le lendemain cependant. Le « setup » était conditionnel à plusieurs facteurs, mais si nous étions bien aux aguets, les chances de voir une tornade étaient encore au rendez-vous.
Synopsis météo
Nous nous sommes réveillés au matin du 9 mai à Norman en Oklahoma. Les orages de la veille avaient évolué en Mesoscale Convective System (MCS). Beaucoup de pluie tombait et une bonne couverture nuageuse était en place. Lorsque cette situation se présente, on souhaite que le MCS bouge le plus rapidement possible afin que l’atmosphère puisse se déstabiliser à nouveau. Il semblait y avoir des outflows boundaries dans le nord du Texas, c’était à surveiller pour plus tard.
Image satellite du matin avec notre position (Flèche rouge).
En regardant les observations du matin et les sondages de l’atmosphère, j’ai tout de suite remarqué que celui d’Oklahoma City montrait un « veer-back » dans les vents.
Téphigramme (carte de gauche) montrant les vents « veer-back » pointé par la flèche rouge.
Que veulent dire les termes « veer » et « back » dans ce contexte ? Veer est pour « veering winds » ce qui veut dire que les vents au sol sont par exemple du sud-est et deviennent graduellement de provenance ouest avec l’altitude. Back veut dire « backing winds » et il s’agit du contraire. Si par exemple les vents sont du sud-est au sol, ils seront de plus en plus de provenance est avec l’altitude.
Quand on parle d’un pattern « veer-back » cela veut donc dire que les vents sont de tendance « veering » jusqu’à un certain niveau en altitude. Par la suite les vents arrêteront leur progression vers l’ouest pour « backer » et revenir avec une tendance sud et/ou est. C’est le pattern qui est pointé sur l’image du haut. Lorsque l’atmosphère montre ce genre de vent, c’est généralement moins bon pour la formation des supercellules et des tornades. Il semble que cela donne du fil à retorde aux courants ascendants.
En regardant le profil un peu plus au sud, on voyait que le « veer-back » n’était pas vraiment présent.
En voyant ceci, l’idée d’aller au sud a commencé à germer. Pas trop au sud cependant car il semblait y avoir plus de CAP et la couverture nuageuse était aussi plus importante vers le Texas semblait vouloir décoller moins facilement.
Une autre information pertinente, la EML (Elevated Mixed Layer) en place plus à l’ouest et visible sur le téphigrame d’Amarillo.
Une EML est caractérisée par une masse d’air beaucoup plus sec en altitude. Comme en témoigne l’écartement entre la ligne de température (rouge) et la ligne d’humidité (verte) sur la carte. La température se refroidit aussi rapidement avec l’altitude, comme en témoigne la perte de 8.3°C par kilomètre d’altitude entre 850 et 500mb. De plus on remarque un petit « nez » de température plus chaude que la surface tout au début de la ligne rouge en partant de la surface. Ce nez est en fait une inversion de température, aussi appelé CAP.
Cette caractéristique de l’atmosphère joue souvent un rôle déterminant pour le temps violent. En plus d’aider à prévenir la formation à trop grande échelle des orages, elle aide aussi l’énergie disponible dans l’atmosphère et empêche l’humidité au sol de venir se mêler à l’air plus sec en altitude, ce qui nuit grandement à la formation des orages. Bref, il était permis de penser que nous aurions de la convection profonde plus tard dans la journée. Pourquoi regarder aussi loin à l’ouest alors que le setup principal était à des centaines de kilomètres de là ? Simple, car l’air est en mouvement constant ! Il faut regarder ce qui se passe aux alentours puisque les conditions du matin dans ces endroits pourraient influencer ce qui va se passer plus tard dans la zone qui nous intéresse. Dans le cas des plaines centrale Américaine, l’élévation beaucoup plus haute dans le coin d’Amarillo vs Oklahoma City ainsi que les différents types de climat qui se côtoient dans ces régions permettent plus facilement la formation des EML.
En regardant les analyses du SPC et les différentes images satellites on voyait bien l’onde courte qui sortait des rocheuses.
Imagerie en vapeur d’eau montrant le centre de tourbillon de l’onde.
Celle-ci devait arriver en après-midi sur nos régions. Cette onde devait apporter une meilleure instabilité avec de l’air un peu plus froid et sec en altitude alors que le dégagement s’effectuerait pour que le soleil fasse son oeuvre. Comme on a pu le voir aussi sur les téphigrammes plus haut, la quantité d’humidité dans le premier kilomètre de l’atmosphère était bonne.
Image de 850mb montrant un bon courant-jet de bas niveau et un bon bassin d’humidité sur les régions du nord du Texas et de l’Oklahoma.
Une dryline devait aussi se former plus tard en journée. Selon les modèles, cette dryline devait s’établir à l’est de la I-35 en Oklahoma. L’avenir nous prouvera qu’il ne faut pas toujours se fier aux modèles. Avoir une compréhension de ce qui se passe en temps réelle avec les observations est très important à la chasse aux tornades. Nous en parlerons un peu plus loin.
Avec les informations qui étaient disponibles à ce moment, nous avons donc décidé de nous positionner un peu au sud-est d’Oklahoma city. Presque à mi-chemin entre cette ville et la frontière du Texas, dans le village de Ada.
Déroulement de la chasse
Nous sommes arrivés à Ada vers l’heure du midi. À ce moment, on pouvait voir, en regardant les petits cumulus bouger rapidement vers le nord, que le courant-jet de bas niveau était bien présent. Celui-ci assurait la bonne quantité d’humidité.
Le jeu pour des outflows boundaries semblait ne pas être en question car il n’y en avait pas vraiment sur l’imagerie satellite. La fameuse dryline commençait à prendre forme. Ce qui était remarquable par contre, c’est que celle-ci semblait plus à l’ouest que prévu initialement. Il semblait aussi se faire un léger renflement dans la ligne, ce qu’on appelle un « dryline bulge ».
Ce phénomène est assez important puisqu’il est rendu possible par des vents un peu plus fort en altitude à cet endroit. Cela augmente donc le cisaillement et la convergence de bas niveau. Cela peut aider la formation des courants ascendants et donc la formation des supercellules. Nous avons alors décidé de nous repositionner un peu plus vers l’ouest, près de Sulphur tout juste à l’est de l’autoroute I-35.
À ce moment, le Storm Prediction Center mettait en ligne les résultats des sondages atmosphériques effectués à Oklahoma City en début d’après-midi. Lorsque nous avons vu ça, on savait que nous avions une bonne atmosphère en place pour la formation de tornades.
Il y avait déjà en place beaucoup d’énergie, avec un CAPE à plus de 2000 j/kg, qui allait encore augmenter un peu avec le temps. Un bon cisaillement des vents 0-6 km supérieur à 40 noeuds et celui-ci allait s’orienter de plus en plus vers l’ouest avec l’onde courte arrivante. Cela donnerait de meilleures chances de voir des cellules isolées avec l’orientation nord-sud de la dryline.
Une inversion de température entre 800 et 750mb était visible. Avec le réchauffement encore prévu et la dépression en altitude qui s’approchait, ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle ne s’érode. Aussi, sur nos régions, il y avait une bonne advection d’humidité avec les observations. Les points de rosée variaient entre 65-68°F. On remarquait aussi sur le mesonet que les vents étaient un peu plus du sud-est sur nos secteurs. Les températures étaient aussi un peu moins élevées qu’au sud-ouest de notre position. La zone au sud-ouest était sous l’effet du réchauffement diurne depuis beaucoup plus longtemps. Est-ce qu’un petit front chaud en formation aurait aidé à rehausser le tourbillon disponible au sol ? Possible.
Observation sur le mesonet de l’Oklahoma peu avant l’initiation orageuse (cercle rouge = notre zone de chasse).
La fameuse dryline était maintenant bien formée. Sur l’image qui suit, il s’agit de la ligne jaune qui traverse l’Oklahoma du nord au sud. À gauche de celle-ci, les points de rosée sont beaucoup plus bas, l’air est donc plus sec. À droite, les points de rosée sont plus élevés, donc l’air plus humide. J’ai ajouté une ligne rouge sur la carte pour démontrer à environ quel endroit, en matinée, les modèles prévoyaient la dryline en après-midi. On parle d’une distance d’environ 100km, ce qui peut faire toute la différence à la chasse aux tornades. Voilà la raison pour laquelle il ne faut pas se fier uniquement aux modèles météos. Si nous avions basé nos décisions uniquement avec ceux-ci, il est possible que notre zone de chasse ait été très différente et que nous manquions les tornades !
Carte montrant les changements d’humidité dans les 3 dernières heures. La zone dans le cercle rouge montre que les points de rosée augmentaient.
Peu de temps après, les premières tours de cumulus commençaient à monter. C’était d’ailleurs bien visible sur l’imagerie satellite. Indiqué par la flèche rouge, la cellule qui allait devenir notre orage tornadique.
Nous étions déjà partis de Ada en direction de Sulphur à ce moment. En voyant que la dryline se formait plus à l’ouest, il fallait ajuster notre zone de chasse. Un autre élément qui envoyait un bon signal était le modèle à très haute résolution HRRR.
Il était très constant depuis plusieurs sorties sur un « helicity track » tout près de Wynnewood. Comme on le disait plus tôt, il faut faire attention avec l’utilisation des modèles et il faut les mètrent en question. Par contre lorsqu’un modèle envoie un signal très constant, on peut penser qu’il voit quelque chose.
Helicity track constamment présent au même endroit.
Avec toutes les données qui étaient disponibles, je me suis amusé à créer un téphigramme et un hodographe de la possible atmosphère juste avant l’évènement. Un peu comme si on avait lancé un ballon-sonde à l’endroit ou les tornades ce sont produites. Voici le résultat, cliquez dessous pour une version plus grande.
Tous les ingrédients étaient en place pour avoir des tornades, possiblement violentes, et ce fût le cas.
En approchant près de la I-35, on commence à remarquer deux bases sous l’orage, ce qui voulait dire qu’elle s’était séparé en deux. Nous avons donc décidé de nous approcher de la base la plus près, puisque c’est elle qui avait le meilleur potentiel pour produire une tornade. Peu de temps après, nous avons commencé à voir un fort mouvement sous le mésocyclone et bingo ! Tornade au sol !
Nous étions parfaitement bien placés pour assister à un spectacle qui allait durer environ 20 minutes. Voici notre position sur l’image radar du moment, indiquée par la flèche rouge.
La tornade se formait de plus en plus et devenait de plus en plus violente. Voici les clichés de la tornade de Katie-Wynnewood qui a par la suite été classée de force EF4.
Vidéo de l’interception de cette tornade.
Cette tornade aura malheureusement causé un décès. Un homme est mort dans sa résidence qui a été complètement détruite par la tornade. Pendant tout le temps qu’elle était au sol, le son de la tornade était très audible. Ce son ressemblait beaucoup à celui d’une chute d’eau en continu.
Après que cette tornade se soit dissipée, nous avons commencé à retraiter vers le sud-est puisque la supercellule a commencée à faire un cycle pour former un autre mésocyclone. Il fallait maintenant rattraper ce qui semblait, sur l’image radar, devenir un monstre.
Une autre tornade, cette fois très large, était au sol au nord de Sulphur. Nous n’avons malheureusement pas pus nous approcher trop de cette tornade. Voici une photo de celle-ci lorsqu’elle traversait devant nous au loin. Cette tornade aura causé des dégâts de classe EF3.
Radar à ce moment avec notre position (étoiles rouges et blanches)
Nous avons repris la route vers l’est. À ce moment, une autre supercellule commençait à se former dans le flanc sud-est de celle que nous poursuivions déjà. La voici d’ailleurs sur l’image satellite du moment. Elle est indiquée par la flèche rouge.
Arrivés au bout de la route, nous avions le choix de monter vers le nord ou descendre au sud pour continuer à chasser. Nous avons décidé de monter au nord puisque cela semblait la route la plus rapide dans le moment. Au moment où nous décidons de nous mettre en route, Marie-Maude nous crie de regarder au loin vers l’est. Une autre tornade était déjà au sol ! Le village de Bromide, situé non loin, subissait une tornade EF3.
La tornade a duré environ 3-4 minutes à partir du moment où nous l’avons observée. Nous avons par la suite tenté de prendre des petits chemins de terre pour trouver des raccourcis et continuer la chasse. Malheureusement, nous sommes arrivés à l’endroit ou la tornade précédente était passée. La route était coupée par des arbres, poteaux et fils barbelés partout sur la route. Nous avons alors décidé d’abandonner la chasse et plutôt aidé les gens présents à dégager la route. Voici d’ailleurs une branche d’arbre que nous avons retrouvée, il y en avait plusieurs comme celle-ci, plantée dans le sol très fermement. La branche était enfoncée d’un bon 8-10 pouces dans la terre. La force des vents d’une tornade est assez incroyable.
Vidéo de quelques dégâts rencontrés.
Toute une journée de chasse au final ! Plusieurs tornades, les plus fortes que les membres de notre équipe ont été témoins jusqu’à ce moment là. Une journée ou la prévision, l’ajustement et l’anticipation ont été à point. Si toutes les journées de chasse pouvaient ressembler à celle-ci ! Mais les défis de la chasse aux tornades sont constants et nous adorons ça ainsi.
Une dépression présentement en formation au Colorado est en route vers le Québec pour la journée de lundi et mardi.
Le tout devrait débuter en neige sur l’ouest de la province et pour les secteurs plus au sud en grésil pour ensuite se changer en verglas et en pluie.
Pour l’ouest : Neige, 15 à 25 cm de neige localement
Pour le sud : Pluie et grésil 5 à 10 mm
Le centre : Neige, Grésil, Verglas et pluie 15 mm en équivalence
Pour l’est : Neige 10 à 15 cm
C’est conditions perdurons jusqu’à mardi soir.
Voici quelques cartes d’accumulations :
Neige et grésil :
Pluie verglaçante :
Environnement Canada a émis des avertissements de pluie verglaçante pour plusieurs secteurs du sud du Québec tôt dimanche matin.
Pour la liste complète : http://meteo.gc.ca/warnings/index_f.html?prov=sqc
Merci et n’oubliez pas que cette prévision est sujet à changement de par la nature des précipitations et des accumulations des différents types de précipitations.
Les modèles nous montrent depuis plusieurs jours que les journées de samedi et dimanche pourraient nous apporter des conditions hivernales sur plusieurs régions du Québec.
Une dépression pourrait nous frapper samedi et dimanche et les précipitations devraient débuter en neige. La pluie et le verglas devraient toucher rapidement les secteurs du sud et la rive-sud du fleuve entre Montréal et Sainte-Marie de Beauce. Pour le moment, la rive nord n’aurait que de la neige.
Les quantités de neige pourraient être entre 5 et 15 cm pour les secteurs au nord du fleuve. Pour ce qui est du verglas et de la pluie, on ne parle que de quelques millimètres (5 à 10 mm).
Côté vent, il ne semble pas en avoir beaucoup pour le moment car la dépression pourrait passer directement sur le fleuve. Les trois modèles que nous regardons (GFS’ NAM et GEM), nous donnent trois scénarios différents pour le moment. Donc, il est impossible de confirmer s’il tombera de la pluie, de la neige ou du verglas en fin de semaine.
Tempête sur le Québec en fin de semaine ? Rien de confirmé pour le moment !
En ce début de semaine, une dépression arrive tout droit du centre des États-Unis et elle apportera des conditions hivernales sur plusieurs secteurs du sud du Québec. Verglas, pluie, neige et vent seront au menu pour la journée de mardi. Les secteurs les plus durement touchés par le verglas seront l’ouest du Québec et les Laurentides avec des quantités d’environ 5 mm ou plus localement.
Pour ce qui est de la neige, les secteurs allant de l’Abitibi au centre du Québec pourraient recevoir jusqu’à 15 cm de neige localement. Les secteurs plus au sud, dont Montréal et Sherbrooke, devraient recevoir des précipitations sous forme liquide principalement avec des températures avoisinant les 5 degrés.
Carte des accumulations possible mardi
Les secteurs au nord de Québec et Charlevoix sont le plus à risque de recevoir de plus importantes quantités de neige.
Les Laurentides sont plus à risque de recevoir les plus grandes quantités de verglas.
Les vents seront du nord-est pour une grande partie de la province sauf pour les secteurs de la rive-sud qui auront droit aux vents sud-est.
Pour savoir si votre secteur est sous avertissement :
Membres présents: Pierre-Marc Doucet, Jolyane Limoges, Mathieu Bordage, Marie-Maude Leduc
Avec nous aussi: Mike Smith, Joe Wallace (Team BCX) et Tristan Péloquin (journaliste de La Presse)
La journée du 7 Mai marquait le début d’une semaine de chasse intense. Depuis le début de notre voyage, nous n’avions pas eu la main heureuse il faut dire. Lors de notre première semaine, les éléments devaient, selon les modèles météo, se déchainer grandement. Or, ce ne fût pas le cas puisqu’il manquait toujours un ingrédient clé lors de chaque journée. Pendant notre deuxième semaine, un gros anticyclone était en place sur le centre des plaines. Pas de chasse donc, mais du bon temps à la plage sur la côte Texane du golfe du Mexique.
C’est bien beau tout ça, mais nous n’étions pas aux USA pour passer du temps à la plage. Nous voulions assister aux déchaînement de dame nature et il nous restait une semaine pour le faire. Il fallait donc que notre « game » soit au top. Après avoir été chercher Marie-Maude à l’aéroport d’Oklahoma City et que le journaliste de La Presse Tristan Péloquin, qui voulait faire un reportage sur nous, soit venue nous rejoindre, nous sommes partis vers le nord. Nos deux amis Mike et Joe devaient aussi nous rejoindre car il semblait qu’un bon « setup » serait en place dans le nord-est du Colorado le lendemain. Pas question de le laisser filer, surtout après notre dure leçon de la saison précédente (les tornades de Simla du 4 Juin 2015).
Synopsis météo.
L’atmosphère montrait des signes encourageants déjà en matinée. Une dépression devait aussi s’intensifier plus tard dans la journée en sortant des montagnes rocheuses. Voici ce que montrait le sondage atmosphérique matinal de Denver.
D’un point de vue orages violents, un tel sondage semble peu convaincant. Cependant, il faut savoir se projeter dans le futur et connaître l’environnement de chasse. Dans l’est du Colorado, l’altitude est beaucoup plus élevé que dans les plaines du centre américain. Les points de rosée au sol n’ont pas besoin d’être aussi élevés que dans cette région vue l’altitude beaucoup plus haute. Des points de rosée de 50-55°F sont considérés intéressants dans cette région pour la formation de supercellules tornadiques. Dans les plaines du centre (Kansas, Oklahoma, Texas, etc…) il faut généralement des points de rosée de surface de 65°F et plus pour être considéré comme potentiel intéressant.
Comme on peut le voir sur le sondage, déjà ce matin-là, Denver enregistrait 50°F au sol et la profondeur de l’humidité jusqu’à environ 700mb était très intéressante. Une EML (Elevated Mixed Layer) entre 650mb et 500mb était aussi visible sur le téphigramme. Cette caractéristique de l’atmosphère joue souvent un rôle déterminant pour le temps violent. En plus d’aider à prévenir la formation à trop grande échelle des orages, elle aide aussi l’énergie disponible dans l’atmosphère et empêche l’humidité au sol de venir se mêler à l’air plus sec en altitude, ce qui nuit grandement à la formation des orages. Bref, il était permis de penser que nous aurions de la convection profonde plus tard dans la journée.
Pour le cisaillement des vents, c’était surtout le cisaillement directionnel qui était discutable. En force, il était très fort (environ 60 kts 0-6km). Par contre il était très aligné vers le nord-nord-est. Cependant vu que les vents au sol au nord du front quasi-stationnaire étaient prévus directement de l’est, nous espérions que cela induise assez de rotation dans les bas niveaux pour créer des tornades. Voici un téphigramme simulant l’atmosphère peu avant le début du spectacle.
L’instabilité s’est bien installé et l’écart entre le point de rosée et la température était très bien. Cependant avec l’alignement des vents, l’hélicité demeurait assez marginale avec la motion des orages pratiquement vers le nord. La supercellule qui a produit la tornade de Wray allait davantage vers le nord-est de ce qui était prévu sur cet hodographe (interaction avec le front chaud ?). Elle bénéficiait donc probablement de plus d’hélicité et cela a surement joué un facteur pour la formation des tornades plus tard.
Le soulèvement orographique de l’est du Colorado, combiné avec un creux en altitude qui se déplaçait lentement sur les secteurs allaient produire une dépression de surface qui irait en s’intensifiant avec l’avancement de la journée.
Carte de 850mb le matin du 7 mai 2016 (étoile noire représente Wray).
Carte de 850mb le soir du 7 mai 2016 (étoile noire représente Wray).
On peut remarquer que les contours se sont accentués un peu dans l’est du Colorado. Signes de renforcement d’un système dépressionnaire. On pouvait aussi voir un bassin d’humidité en place dès le matin. Cette humidité allait rester en place dans un corridor au nord de la zone frontale alors qu’une dryline se développerait plus au sud dans la journée.
On pouvait aussi remarquer un peu plus haut à 700mb, l’arrivée du creux. On le remarquera aussi sur l’imagerie de vapeur d’eau.
Carte de 700mb le matin du 7 mai 2016 (étoile noire représente Wray).
Carte de 700mb le soir du 7 Mai 2016 (étoile noire représente Wray).
Tout se mettait donc en place pour que le nord-est du Colorado connaisse un épisode de temps violent, particulièrement des tornades.
Cela dit, deux ombres au tableau étaient notables. Dans cette région, de part la nature élevée du terrain, la proximité des rocheuses et les température souvent plus froides en altitude, les orages ont tendance à se former rapidement, malgré la présence d’une EML. Nous espérions donc que celle-ci tempère la formation des courants ascendant pour que les orages restent le plus isolé possible. Aussi, avec la nature assez linéaire des hodographes, le risque de voir des supercellules se diviser et interagir ensemble était plus élevé . Néanmoins, la fenêtre d’opportunité semblait être près du nord-est de la dépression de surface, si les orages pouvaient rester dans le sillage du front chaud/quasi-stationnaire alors que la meilleure humidité allait se retrouver dans ce secteur.
Déroulement de la chasse.
Nous sommes donc parti de la ville de Hays au Kansas ce matin-là. Notre cible initiale était la ville de Sterling au Colorado, environ 90 km au nord-ouest de Wray.
Par contre, déjà en début d’après-midi une première ligne de faibles orages s’était formé dans la zone cible. Nous avons donc ajusté notre cible un peu plus au sud. Les observations de surface montraient que le front chaud ne se déplaçait vraiment pas rapidement vers le nord.
Observations en après-midi du 7 mai 2016 (étoile noire = Wray).
Le show principal lui devait commencer par la montée des orages à l’intersection du front froid, de la dépression de surface et de la dryline en développement. Ce fût le cas en milieu d’après-midi.
Nous avons donc commencé à suivre une supercellule en développement au sud de Cope, environ 70-80 km au sud-ouest de Wray. Ces orages semblaient cependant avoir un peu de misère à rester isolés et à bien se développer. Néanmoins nous avions droit à un beau spectacle de mammatus.
Nous avons dû remonter vers le nord sur des routes de terre assez peu entretenue (merci Xterra) puisque notre cellule devenait de plus en plus forte et montrait au radar des signes de grosse grêle. Comme on ne voulait pas se faire démolir le camion, nous devions devancer le tout.
Arriver sur une route plus au nord, un autre groupe d’orages situés au nord-ouest de notre position produisait des tornades selon les informations dont nous disposions. Que faire ? Lâcher la supercellule sur laquelle nous étions et qui semblait avoir de la misère ? Allez chercher ce groupe de cellules qui était quand même assez éloigné ? Après un peu de tergiversation, on décide de rester sur notre orage, toujours en gardant en tête qu’il devrait rencontrer des meilleures conditions éventuellement.
Nous repartons donc vers l’est afin d’avoir une vue dégagée sur la base de l’orage. La supercellule montrait des signes de renforcement et au radar, la présence d’un mésocyclone commençait à paraître.
Imagerie radar des précipitations (gauche) et de la vélocité (droite) à ce moment.
Visuellement parlant, la supercellule devenait un peu plus définie, mais toujours rien de très spectaculaire.
Cependant, dans les 10 minutes suivantes, l’orage a encore montré des signes de renforcement rapide. À un tel point qu’à un certain moment un wall-cloud et une formation suspecte sous le courant ascendant principal s’est formé. Par contre, cela a rapidement été englobé par de la pluie. Il s’agissait probablement de scud, mais cela annonçait aussi un changement dans la structure de l’orage qui devenait plus près de la surface.
Nous avons par la suite vécu une anecdote assez inquiétante. L’activité électrique était très élevé pendant cette phrase de l’orage. À un certain moment, Mathieu entend un bruit de « TIC » répétitif dans le camion. On l’éteint pour voir si c’est un problème mécanique, mais le bruit continue. Marie-Maude remarque alors que mon fil de CB qui n’était pas branché produisait des étincelles et le bruit correspondait au moment ou ces étincelles bleues apparaissait. Il y avait donc probablement une charge électrique sur l’antenne !! Heureusement, il ne s’est rien passé par la suite, le tout c’est arrêté sans que rien ne se produise. Fiou !
Suite à cet événement, les choses se sont mise en place rapidement. La supercellule montrait maintenant des signes de maturation évident et d’autres orages commençaient à se former plus au sud de celle-ci. Les observations de surface montraient des vents de l’est juste au nord du front et les points de rosée dans l’ordre du 52-54°F. Aussi, les observations du profileur vertical des vents de Goodland au Kansas (environ 90 km au sud-est de Wray) montrait un potentiel d’hélicité 0-1 km de plus de 300 m2/s2 avec nos vents de provenance est.
Image satellite visible au moment des tornades. Notre supercellule est indiquée par la flèche rouge.
Arrivés dans le village de Wray, nous sortons de la ville juste un peu au nord pour avoir une meilleure vue de la première supercellule qui allait produire une tornade. La cellule en question se déplaçait franc nord. Nous étions donc à l’écart du danger pour le moment même s’il fallait rester aux aguets puisqu’une autre supercellule se développait juste au sud.
Nous avons commencé par voir un petit entonnoir se développer sous la base. Puis celui-ci devenait de plus en plus gros. Après un bon 5 minutes il a fini par toucher le sol et la tornade à duré ainsi un autre 10 minutes environ.
La tornade se dissipait et la supercellule du sud interagissait trop avec celle que nous observions. Il était temps de se repositionner vers le sud-est. Nous nous sommes un peu arrêté dans le village de Wray pour voir comment la supercellule évoluait et nous avons eu droit à quelques petits « spin-ups » près de nous.
Maintenant en direction est, un peu passé le village, nous avons encore décidé d’observer se qui ce passait. La supercellule était simplement magnifique. On voyait parfaitement le mésocyclone et il semblait se dessiner un « RFD cut » derrière celui-ci.
Environ 10 minutes après cette photo, le nuage en entonnoir a commencé à se former juste devant nous. Le reste du spectacle fût incroyable pendant un autre bon 15 minutes.
Imagerie radar au moment de la tornade. À gauche la réflectivité des précipitations avec l’écho en crochet. À droite, la vélocité des vents montrant la signature tornadique.
Nous avons par la suite tenté de trouver une route vers le nord pour essayer de suivre la supercellule. Malheureusement, le réseau routier étant très peu élaboré dans cette région, il nous a été impossible de continuer à la suivre.
Nous avons donc mis un terme à la chasse. Nous sommes repartis vers le sud puisque dès le lendemain nous avions la possibilité de voir d’autres tornades au Kansas ou en Oklahoma. Ce fût toute une journée et nos efforts ont été récompenser en étant toujours à l’affût de ce qui se passait et en faisant confiance à nos prévisions.
La première tornade fût classée EF0 puisqu’elle n’a rien touché. La deuxième tornade a été classée EF2 avec des vents de 200-215 km/h. Elle aura parcouru environ 10 kilomètres et aura été d’une largeur d’environ 400 mètres à son plus large. Heureusement il n’y a eu aucun mort, mais quelques blessées ont été rapportés.
Il y a une faible dépression qui approche sur le Québec et qui laissera quelques centimètres sur le sud et le centre du Québec dans la nuit du 27 au 28 octobre.
La rive-nord entre Ottawa et Québec pourrait recevoir entre 5 et 15 cm. La rive-sud pourrait voir des accumulations entre 5 et 20 cm, plus particulièrement en Beauce. La région de Montréal risque de ne recevoir que quelques averses mais ces averses seront généralement sous forme de pluie.
La neige se changera en pluie partout au Québec vendredi dans la journée.
L’ouragan Matthew reçoit beaucoup de couverture cette semaine. Normal puisque cette puissante tempête risque de causer beaucoup de dégâts et de pertes humaines en plusieurs endroits dans l’Atlantique. Son nom sera fort probablement retiré de la liste à la fin de l’année.
Est-il possible qu’un ouragan touche le Québec ? Pas vraiment. Nous avons souvent ce qu’on appelle « les restes » ou plutôt un système en transition extra-tropicale (post-tropicale).
Pour qu’un ouragan se forme et se maintienne, il doit avoir une source suffisante de chaleur et d’humidité. Donc les conditions propices à cela se retrouvent au-dessus de l’océan et l’eau doit avoir une température d’eau moins 26°C, cette couche de température doit couvrir plusieurs mètres en profondeur. Il faut aussi que les conditions de cisaillement des vents (changement des vents en force et direction avec l’altitude) soient faibles. Un ouragan faiblira rapidement lorsqu’il entre dans les terres.
L’endroit le plus près, en ligne droite, d’où se trouvent les premières terres du Québec par rapport à l’océan Atlantique (on exclut ici le Golfe du St-Laurent) est d’environ 200 kilomètres de distance. Aussi, l’eau dans cette zone est entre 12-14° Celsius. Bien loin de notre marque minimale.
De plus, en montant en latitude, il y a beaucoup plus de chances que notre ouragan se retrouve dans la trajectoire d’une dépression de mi-latitude. Le cisaillement des vents y sera plus fort et l’interaction avec ces systèmes auront tendance à lui faire perdre ses caractéristiques tropicales.
En gros, voici les différences entre les caractéristiques d’un ouragan et d’un système post-tropical.
Un ouragan est tellement puissant, que la pression sera plus haute en altitude que près du sol ou elle sera très basse. Avec un système extra-tropical comme on connaît, c’est le contraire, la pression baisse avec l’altitude. Les vents les plus forts d’un ouragan seront donc concentrés dans le premier kilomètre de l’atmosphère, tandis que dans un système extra-tropical, ils seront beaucoup plus haut, associés au courant-jet.
Lors d’un ouragan, les vents les plus forts seront concentrés près de l’oeil. On appelle cette région le mur de l’oeil ( plus d’infos ici ). Dans un système post-tropical les vents les plus forts en surface seront beaucoup plus éloignés du centre.
Distributions des vents d’une dépression post-tropicale. (Flèche rouge indique l’endroit des vents les plus forts, le « L » rouge indique le centre de la dépression.
Les systèmes tropicaux (ouragans) sont des systèmes avec un « coeur » chaud et les systèmes extra-tropicaux ont des « coeurs » froids. Il existe donc une période de transition entre les deux types de systèmes parce qu’il y aura une interaction avec une autre dépression qui fusionnera avec le système tropical . Voici deux exemples avec ce qui est prévu pour Matthew.
« Coeur » chaud de Matthew prévu près des Carolines. Le « X » représente le centre de l’ouragan. On remarque les couleurs de plus en plus chaudes près du centre.
« Coeur » plus froid et en transition lors de son passage prévu sur les maritimes. Le « X » est le centre dépressionnaire. On remarque que l’air chaud se décale vers la droite et l’air froid envahit la partie gauche et le centre. Un pattern similaire aux systèmes frontaux (front froid/front chaud) s’installe alors qu’il est absent avec l’ouragan.
Autre différence, la distribution des précipitations. Au niveau de l’ouragan, les bandes de précipitations seront bien enroulé avec le centre du système. Avec le système post-tropical, nous perdons ce pattern. Les précipitations seront plus étalées et généralement, le gros de celle-ci va tomber à la gauche du centre dépressionnaire.
Précipitation prévue sur 24h lors du passage de Matthew. Le « X » est le centre dépressionnaire. On voit que le gros des précipitations se situe à gauche du centre.
Des ouragans ont déjà frappé les provinces maritimes. Généralement ils sont des catégories 1 ou 2 (vents entre 120 et 175 km/h) lorsqu’ils arrivent sur ces secteurs car les eaux très chaudes sont assez loin de nos régions. Sans perdre leurs caractéristiques tropicales, ils ont néanmoins le temps de faiblir avant d’arriver.
Pour conclure, les possibilités qu’un ouragan touche le Québec sont très minces pour plusieurs raisons. Nous sommes trop éloignés dans les terres. Les eaux de l’Atlantique les plus proches de nous sont bien en deçà du seuil minimal de température requis pour maintenir un ouragan. L’interaction avec d’autres systèmes météo fait en sorte que l’ouragan va perdre ses caractéristiques tropicales.
Les systèmes post-tropicaux représentent aussi des dangers. Ce sont de très fortes dépressions qui peuvent produire des fortes pluies, des vents de plus de 100 km/h et même encore des marées de tempêtes comme lors d’un ouragan. Ce ne sont pas des systèmes à prendre à la légère. Ils sont seulement différents de leurs cousins les ouragans.
Le 23 juillet, un scénario météo s’annonçait intéressant pour notre chasseur Mathieu Lussier. En effet, Environnement Canada avait émis des veilles et des alertes d’orages violents pour le secteur de Montréal.
Déjà à 10h, Mathieu était prêt. Comme il observait de la convection vers Rawdon, Mathieu a décidé de se rendre sur l’autoroute 30 entre Varennes et Verchère.
Aux alentours de 11h55, une magnifique cellule s’est formée et Mathieu a eu droit a un magnifique shelf cloud, le tout agrémenté d’un ciel turquoise hors du commun. L’orage se déplaçait à une vitesse phénoménale vers Saint-Hyacinthe avant de changer de direction vers le sud.
La chasse s’est terminée pour Mathieu lorsque les orages ont passé sur la rive-sud.